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Après une grande période dans l’ombre, la fiscalité est enfin considérée comme une source clé pour le financement d’un développement durable. Cependant, la majorité des systèmes fiscaux africains n’arrivent pas à mobiliser assez de recettes. Bien que des défis tels que de larges secteurs informels, une faible conscience fiscale et la faible qualité des services publiques soient souvent cités comme des barrières principales à une fiscalité effective, l’élément souvent oublié est le fait que les pays africains ont perdu beaucoup plus de recettes fiscales du fait de la difficulté encourue dans le décèlement des flux financiers illicites provenant du continent.

Entre 1970 et 2008, les « stocks » des flux financiers illicites à partir de l’Afrique sont chiffrés autour de 854 milliards de dollars américains, montant qui aurait suffit à payer la dette extérieure du continent et retirer un surplus de 600 milliard de dollars américains pour réduire la pauvreté et stimuler la croissance économique. Le gros de ces flux illicites – à peu près 60 à 65 pourcent du montant total – comprend les taxes non payées ou réduites sur les profits que les compagnies, particulièrement les compagnies multinationales, font sur les transactions entre juridictions fiscales afin de réduire leur facture fiscale (à zéro dans certains cas). En comparaison, seulement 3% du montant total de flux illicites représente le produit des pots de vin et malversations par les autorités gouvernementales. Néanmoins ces actions continuent à recevoir beaucoup plus d’attention, particulièrement dans les pays africains.

Les administrations fiscales ont beaucoup de difficultés à détecter ces flux illicites qui se déroulent à travers des mécanismes sophistiqués d’évasion fiscale qui impliquent la manipulation de prix de transfert, l’exploitation de failles dans les lois fiscales et qui sont facilitées par l’opacité financière offerte par les juridictions opaques ou paradis fiscaux aux compagnies multinationales et riches individus. Les compagnies multinationales et les individus nantis utilisent les services offerts par l’opacité financière pour cacher leurs avoirs et éviter de payer l’impôt sur ces avoirs qui serait normalement dû dans d’autres juridictions.

En 2005, il était estimé par le Réseau pour la Justice Fiscale (Tax Justice Network - TJN) que 11.5 mille milliards de dollars de richesse privée était stockée dans les juridictions opaques impliquant une perte annuelle globale de 255 milliard de dollars en recettes fiscales. Les juridictions opaques causent un manque à gagner aux pays développés aussi bien qu’aux pays en développement, mais dû au fait que ces derniers disposent en général de ressources beaucoup plus limitées, ils ont un impact beaucoup plus dévastateur sur les finances publics des pays en développement.

Si les pays africains veulent sérieusement améliorer les conditions de vie de la majorité de leurs citoyens, ils ne peuvent plus se permettre de continuer à perdre des recettes fiscales de cette manière. Si la situation actuelle persiste, il est fort improbable que les pays africains vont atteindre les Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD) en 2015 et les vies des communautés appauvries vont de se détériorer.

Mesure de l’Opacité Financière, la Corruption, et les Flux Financiers Illicites

Le Réseau pour la Justice Fiscale a développé en 2009 un Indice d‘Opacité Financière (Financial Secrecy Index-FSI) afin de démontrer l’importance de l’opacité dans la finance internationale ainsi que son impact dévastateur sur une collecte fiscale juste et efficace par les pays développés aussi bien que ceux en voie de développement. En procurant l’opacité financière, ces juridictions créent un environnement favorable aux flux illicites de capitaux, à la corruption, au blanchissement d’argent ainsi que d’autres activités néfastes. Ce côté « offre » de la corruption n’est jamais le focus d’indices sur la corruption telles que l’Indice de Perception de la Corruption de Transparence Internationale, bien qu’il soit aussi important que la mesure du niveau de corruption à l’intérieur d’un pays.

Dans l’édition 2011 de l’Indice d’Opacité Financière, le Réseau pour la Justice Fiscale continue d’identifier les juridictions les plus agressives dans la procuration de l’opacité dans le monde de la finance internationale. Il combine un score d’opacité à une mesure de poids global afin de créer une classification de pays qui offrent le plus d’opacité dans le domaine de la finance internationale. En classant les juridictions opaques selon à la fois leur degré d’opacité et l’importance de leurs activités, il permet un classement indépendant des acteurs et territoires les plus importants.

Résultats de l’Indice d’Opacité Financière 2011

Contrairement à l’idée reçu, le FSI 2011 montre que la plupart de juridictions opaques ne se trouvent pas dans ‘des îles ensoleillées au large du Pacifique’ mais plutôt dans des pays plus riches tels que les Etats Unis d’Amérique, le Royaume Uni, l’Allemagne et le Japon. La Suisse procure le plus d’opacité financière dans le monde entier. Les membres de l’Organisation pour la Coopération et le Développement Economiques (OCDE) et les territoires sous leur contrôle représentent 84% du marché mondial des services financiers offshores. Le FSI 2011 a identifié 5 pays africains comme juridictions opaques, le Liberia en première place, suivi par l’Ile Maurice, le Ghana, le Botswana et les Seychelles.

La Solution

Le FSI 2009 aussi bien que celui de 2011 démontrent que quand on considère les deux côtés (offre et demande) de la corruption, l’Afrique n’est pas l’un des continents les plus corrompus au monde tel que suggéré par l’Indice de Perception de la Corruption de Transparence International. Il est aussi clair que vu la concentration de la plupart des juridictions opaques dans les pays développés, lutter contre la fuite de capitaux due à l’évasion, la fraude fiscale et la corruption (y compris les flux financiers illicites) doit être un effort global en vue de transformer le système financier mondial. Les gouvernements africains doivent appuyer les demandes pour plus de transparence dans les transactions financières et l’adoption d’un reporting pays-par-pays pour les compagnies multinationales comme nouveau standard international en vue de permettre aux administrations fiscales de mieux déceler l’évasion fiscale.

Pour les requêtes d’ordre général, veuillez contacter: Sandra Kidwingira sandra.kidwingira@taxjustice.net +254 20 2473373 or +254 728279368

Pour plus d’informations sur la méthodologie du FSI, visiter http://www.financialsecrecyindex.com ou contacter Markus Meinzer markus@taxjustice.net